Plongeon au cœur de la CDP : Entre fantasme et réalité
Depuis quelques temps, la CDP (Customer Data Platform) est très fréquemment citée comme LA solution incontournable dans l’univers des MarTech pour orchestrer les interactions On et Offline avec les clients. Ne pas en être équipé relèverait de la faute stratégique pour les entreprises qui souhaiteraient rester performantes.
Face à cette menace, certaines entreprises n’hésitent pas à s’engager dans des projets CDP de manière hâtive, parfois sans compréhension approfondie, et surtout sans évaluation des retours sur investissement potentiels.
Du côté de nos confrères consultants et de nos amis éditeurs, les avis sont très partagés. Certains font de la CDP un cheval de bataille et la positionne au cœur de leur offre, tandis que d’autres se questionnent sur la possibilité d’avoir négligé ses avantages. La place de la CDP suscite ainsi un débat animé au sein de la communauté, entre engagements forts et interrogations sur d’éventuels bénéfices insoupçonnés.
A cette défiance s’ajoute une interrogation sur les aspects fonctionnels qui différencient une CDP d’autres briques « historiques » d’un SI Client comme les référentiels client, les datalakes, les datawarehouses, les plateformes CRM, le Marketing Automation ou encore la DMP (Data Management Platform) que la CDP semble avoir remplacée en termes de tendance dans le cœur des marketers.
Alors que les entreprises s’efforcent de fournir des expériences personnalisées et fluides à leurs clients, les CDP apparaissent comme des solutions complètes pour collecter, unifier et exploiter les données clients dans une optique de prise de décision stratégique. Au travers de cet article, qui s’ajoute à la littérature déjà très fournie sur les CDP, nous allons donc :
- Définir ce qu’est une CDP
- Préciser son utilité et ses fonctionnalités
- Exprimer notre avis sur le sujet et évoquer les opportunités d’engager un projet CDP
Qu’est-ce qu’une CDP ?
La CDP est une plateforme qui centralise les informations Client provenant de sources multiples. Elle les rassemble, les structure, les consolide et les enrichit pour enfin les redistribuer afin d’engager des actions promotionnelles ou relationnelles sur différents canaux d’interactions pilotés par des fonctions Marketing, Ventes, Service Client, e-Commerce, etc.
Le tableau ci-dessous décrit les macro-fonctionnalités revendiquées par les CDP, en considérant que toutes les plateformes existantes ne couvrent pas la totalité de ces fonctionnalités.
L’utilité d’une CDP et ses fonctionnalités
Une CDP permet de centraliser la vision unique du « Client » avec les données qui le caractérisent pour ensuite les diffuser vers des briques Front ou Backoffice afin d’engager des actions d’activation via différents canaux. Ces plateformes sont multi-sources et multi-connecteurs pour collecter, rapprocher et structurer un maximum d’informations utiles avant de les distribuer dans le SI. Ce « Client » peut être :
- Un prospect dont les données de navigation et les informations saisies sur son parcours sont collectées pour déclencher une action,
- Un client identifié auquel pourront être associées des informations qualifiantes (signalétiques, comportementales, segmentation, score, …) pour personnaliser au mieux les offres proposées.
La CDP promeut le « no code », autrement dit la garantie d’une facilité d’utilisation à la portée d’utilisateurs métiers et sans adhérence avec les directions IT. Ceci tant sur les aspects de « mapping » ou de réconciliation des données, que d’orchestration des scénarios d’activation omnicanaux.
Parmi les cas d’usage portés par les CDP, figure donc en premier lieu la consolidation de la vision Client via la réconciliation de plusieurs sources. Viennent ensuite des cas d’usage métiers comme les abandons de panier, la création d’audiences activables ou encore les communications d’alerting en cas de baisse de prix. S’ajoutent à cela des propositions de ventes croisées ou additionnelles lors d’un parcours On ou Offline, mais aussi la personnalisation de parcours digitaux suivant le comportement de l’utilisateur.
Ces cas d’usage ne sont ni originaux ni dédiés exclusivement à la CDP, mais ils présentent assurément des retours sur investissement significatifs s’ils sont bien opérés.
Les opportunités d’engager un projet CDP et notre avis sur la question
Selon notre perception, la notion de CDP reste encore floue, avec des définitions très hétérogènes sur les fonctionnalités couvertes et leur utilisation. Ce flou contribue paradoxalement à entretenir un fantasme autour de ces plateformes. Du côté des donneurs d’ordres en entreprises, cela se manifeste par un désir de lancer ces projets à la hâte. Concernant les éditeurs, cela permet à certains d’entre eux d’enrichir leur offre (ou du moins leur discours) lorsqu’ils en sont dépourvus, en proposant cette brique.
La réalité est qu’il faut savoir raison garder. En effet, bien que les bénéfices d’une CDP soient réels, la mise en place et la réussite d’un tel projet exigent une réflexion préalable à double niveau.
La première chose à avoir en tête est que les CDP ne cochent pas toutes les cases par rapport aux fonctionnalités décrites plus haut. Certaines CDP, renommées ainsi, sont en réalité issues de briques anciennes qui couvraient une partie des fonctionnalités précitées. D’autres, à l’inverse, représentent de nouveaux produits cherchant à inclure le maximum de fonctionnalités. Il est donc nécessaire, d’une part, de bien définir vos attentes en termes de besoins métiers et d’autre part, d’appréhender les fonctionnalités manquantes de votre SI pour s’orienter vers la plateforme la plus adaptée à votre contexte.
Le deuxième argument est que les plateformes CDP s’inscrivent souvent dans des contextes de rachat ou de rapprochement entre éditeurs, avec un niveau d’intégration parfois décevant et des fonctionnalités encore dans les roadmaps… Nous ne le répèterons jamais assez, les projets liés à ces plateformes requièrent systématiquement un travail d’intégration et la promesse de connecteurs multi-sources pour une intégration sans couture est très difficile à tenir. Ajoutez à cela les sujets de collecte des données de parcours digitaux via les plans et outils de taggage qui exigent également des itérations et ajustements, et vous comprendrez rapidement qu’il est nécessaire d’inclure dans le planning projet des chantiers dédiés et du temps pour cette intégration.
Enfin, nous avons tendance à penser que l’on ne peut pas être bon partout et qu’il faut être prudent vis-à-vis des éditeurs qui revendiquent une couverture fonctionnelle aussi étendue (RCU, datalake, animation relationnelle, communications omnicanales, pilotage…).
A ce titre, l’alternative des briques « best of breed » est à considérer. Très performantes dans leur domaine, elles s’intègreront entre elles pour enrichir des scénarios d’activation par une approche itérative et empirique. Cette option est à envisager lorsque votre entreprise possède déjà des SI couvrant une partie des fonctionnalités identifiées dans la 1ère partie de cet article.
En conclusion, si la réflexion n’ext pas guidée par les besoins précis d’activation et la prise en considération de la couverture fonctionnelle du SI existant, la déconvenue risque d’être forte et le résultat en deçà des attentes.
Le recours à une CDP est pertinent lorsque l’on ne dispose pas d’un SI permettant de gérer la vision client, de structurer et consolider les données, et de les préparer pour une activation plus ou moins complexe. Autrement dit, si vous avez des systèmes transactionnels sources et une plateforme de Marketing Automation sans briques intermédiaires RCU / DataWarehouse ou autre, alors la question d’une CDP se pose.
La question peut également se poser si vous avez une plateforme Marketing Automation ou une solution de personnalisation de sites web avec lesquelles elle s’intègrera. Les bénéfices d’une CDP résideront dans l’enrichissement des informations du CRM par des données tierces (navigation par exemple) et à l’orchestration centralisée des actions d’activation sur les prospects (abandon de panier, price drop…).
Enfin, si vous n’avez pas du tout de SI Client, la solution d’une CDP est clairement à envisager pour aller vers une intégration forte et une couverture fonctionnelle large. Vous pourrez néanmoins difficilement vous passer de briques additionnelles permettant d’activer / router des communications sur différents canaux et parcours.
Le point d’attention étant qu’il est nécessaire de bien identifier vos objectifs, les bénéfices métiers et financiers attendus ainsi que la stratégie d’activation que vous souhaitez mettre en place en termes d’audience, de canaux et plus généralement de parcours client. Quelle que soit l’option choisie, une démarche itérative de mise en place use case par use case doit être le principe directeur de tous les projets autour de l’activation client.